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1er accélérateur des 146 000 entreprises de la Métropole

Marseille enclenche sa transformation en «port intelligent»

Le comité de pilotage du « French smart port in Med », réuni ce 16 novembre, a adopté une première salve de projets. Cela fait quelques mois qu’un collectif d’acteurs planche sur la mise en œuvre d’un projet qui vise à rendre le port de Marseille sobre et connecté. Décryptage.
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    Vendredi 17 novembre 2017

     

    Smart city + port city = smart port ? Considéré ainsi, le smart port serait donc une déclinaison au port de la ville intelligente. Smart ? rappelons : plus économes donc durables, plus propres car vertueux, plus intelligents car connectés et interactifs ...


    « Ce n’est pas un effet de mode », évacue d'emblée Frédéric Rychen, enseignant-chercheur au sein d'Aix-Marseille Université, qui intervenait à l'occasion de la rencontre d'affaires organisée par le Pôle SCS ce 21 novembre à La Coque, nouveau lieu d'innovation récemment implanté au coeur d'Euroméditerranée*.

    « C’est une exigence au regard de la complexité croissante des ports. Avant, la mission fondamentale d'une infrastructure portuaire était de recevoir des navires et de gérer des lignes maritimes. Aujourd'hui, les ports doivent être aussi des hubs d’articulation entre les chaînes maritime et terrestre avec des flux totalement globalisés. En concurrence, ils doivent structurer ces noeuds de communication de façon à drainer le plus de marchandises possibles. Tous ces réseaux augmentent la complexité, génèrent des flux de plus en plus importants, et l’on voit apparaitre de plus en plus des conflits entre le développement économique du port et le territoire (nuisances, bruit, activité, trafic …). La problématique du smart port est de permettre d’agréger et reconfigurer ces réseaux de façon à les optimiser, ainsi, de réduire ces externalités, mieux prévoir les flux, d’aménager ou informer en conséquence. Les technologies digitales permettent de l'envisager ».

     

    Des enjeux pluriels
     

    Cela fait quelques mois déjà qu’un collectif d’acteurs**, fédérant autour du Grand port maritime de Marseille (GPMM), les collectivités, les milieux économiques et institutionnels et les services de l’État, planchent sur la mise en œuvre d’une démarche dite « smart port ». Avec pour champs prioritaires, des enjeux logistiques naturellement, pour améliorer la performance du passage portuaire (pré et post acheminement, accessibilité des quais, trafic de poids lourds ...). Mais aussi avec une visée qui va bien au-delà, et à plus ou moins longue échéance : inventer des modèles énergétiques plus « smart », (permettre au port de produire sa propre énergie via le recours à de nouvelles énergies plus vertes) sachant que la transition et la diversification énergétiques figurent parmi les priorités de la stratégie 2019-2023 du troisième port mondial d’hydrocarbures.

    « Les ports sont des surfaces disponibles pour développer des pilotes de nouvelles sources d'énergies notamment dans les zones industrialo-portuaires », poursuit Frédéric Rychen, membre en outre du Conseil de développement du GPMM. 

    L'objet du Comité de pilotage*** du projet, qui s'est réuni le 16 novembre à la préfecture de région, était d'acter une première série de projets (lesquels « s'intègrent dans l'Agenda métropolitain du développement économique, le Schéma régional de développement économique d'innovation et d'internationalisation et en phase avec les Opérations d'intérêt régional portés par la Région », est-il précisé). Ils explorent plusieurs domaines : la logistique, la transition et efficacité énergétiques, la mobilité et gestion prédictive des flux, l'environnement et la sûreté, la numérisation de l’espace public et mise à disposition de données (cf. plus bas).

     

    Six objectifs

    « On a identifié six objectifs opérationnels », décrypte Nicolas Frachon, responsable des grands projets métropolitains à la CCI Marseille Provence, qui insiste fortement sur le fait que l'objectif premier de la démarche est bien de créer de la valeur et de faire émerger des opportunités de business : « il va falloir développer des applis numériques pour répondre à nos enjeux de fluidification du passage portuaire et d'optimisation des flux énergétiques, mais aussi des solutions pour suivre l’impact des activités portuaires sur l’environnement. Il y a également des objectifs liés à l’approvisionnement énergétique des navires à quai et au développement de nos initiatives autour de l'économie circulaire actuellement sur la zone industrialo-portuaire ».

    Le représentant de la Chambre de commerce, dont la mission est d'acccompagner les grands projets métropolitains structurants (éolien flottant, Henri-Fabre et l'industrie du future, nouveaux usages aériens avec les drones et dirigeables, l'immunologie...), fait référence aux démarches en cours sur la plateforme industrielle d’innovation Caban Tonkin, dont l'enjeu est de parvenir à ce que des industriels s'échangent des commodités et énergies afin de gagner en sobriété. La création d'un réseau vapeur est identifiée comme une des actions qui auraient des chances d'aboutir plus rapidement.

    Dans la même veine de diversification énergétique, le port accueille également d'autres expérimentations, en amont à l'instar du démonstrateur de stockage d’électricité Jupiter 1000 (Lire à ce sujet : Le premier démonstrateur français Power-to-Gas à Fos-sur-Mer) ou avancées, avec les boucles d’eau de mer développées par Engie et EDF solutions (cf.Quand EDF et Engie emploient leur énergie à relever le défi climatique).

     Le développement d’un smartgrid portuaire cache un autre enjeu, soutiennent les promoteurs du smart port : celui de la compétitivité du territoire. « L'accès à l’énergie est un utilité fondamentale, un vecteur de coût non négligeable pour certaines industries, donc développer des solutions smart qui mobiliseraient des complémentarités que ce soit dans le partage d’utilités ou de nouvelles sources d’énergie est un élément capital, poursuit le chercheur universitaire. Si on arrive à digitaliser les flux énergétiques, on va pouvoir les recombiner et les réagréger pour offrir de nouveaux services aux industriels qui pourraient se localiser dans la zone industriallo-portuaire ».

     

    Des innovations qui ne s'arrêteront pas aux frontières du port

    À Marseille, compte tenu de sa spécifique (un port ancré dans sa ville), il en est aussi attendu des facilités dans les relations et les interactions entre le port et la métropole. Pour rappel, le littoral portuaire phocéen est concerné depuis deux décennies par l’une des opérations de renouvellement urbain les plus importantes en France (600 ha avec en cours, l’aménagement d’une seconde tranche qui vise à faire émerger une Ecocité, soutenue par l’État via les Investissements d’avenir). Étant entendu que les innovations ne doivent donc pas s’arrêter aux frontières du port mais se traduire aussi dans les rues.      

    Compte tenu de la diversité de maîtrises d’ouvrages et de financements possibles alliant initiatives publiques et / ou privés (programmes européens Horizon 2020 et FEDER, Investissements d’avenir, programmes Port du futur, OIR, Pacte d'innovation de l'Etat, etc.), les conditions de déploiement seront donc à échéances variables. Principe retenu...

     

    Rationaliser la gestion des flux de marchandises

    Ils sont encore peu nombreux parmi les ports européens et au-delà, à la manœuvre de ce genre de démarches qui peuvent à terme offrir un marqueur de différenciation. Ou du moins, elles ne se présentent pas de façon globale. Des initiatives disparates commencent toutefois à émerger, ici et là.

    Très souvent, les enjeux logistiques (logique d’intégration du numérique dans les systèmes portuaires, notamment) et énergétiques (limiter les émissions de CO2 en développant des solutions favorisant la production d’énergies renouvelables, les solutions de stockage, l’efficacité énergétique ainsi que l’éco-mobilité) sont au fondement des actions initiées ici et là, que ce soit à Hambourg ou Rotterdam, où la surface foncière limitée a très vite généré le recours aux technologies dites « intelligentes ». Mais aussi à San Diego ou Valence.

    Souvent aussi, les milieux académiques (universités et centres de recherche) et les entreprises innovantes sont sollicitées. Ainsi Rotterdam a-t-il développé le Container Exchange Route, une plateforme numérique qui optimise les échanges intermodaux sur le port et le We-nose network, un réseau de capteurs lui permettant de mieux réguler l’impact des activités portuaires sur l’air.

     

    Visibilité immédiate sur l’intégralité de l’infrastructure portuaire

    Hambourg, qui ambitionne d’être « la vitrine de l’innovation portuaire dans le monde », a travaillé avec Cisco Systems (l’américain est déjà à l’œuvre dans bon nombre de smart cities, tout comme IBM, Microsoft ou Siemens) à l'optimisation du trafic via un réseau de capteurs et de dispositifs d’informations reliés à un Port Road Management Center, qui informe en temps réel les acteurs du port sur les trafics, l'heure d'arrivée des navires, les voies de circulation à emprunter, les places de parking disponibles, les délais d’amarrage des bateaux … toutes informations qui permettent de gagner en efficacité logistique.

    Sur le range sud, les initiatives sont moins visibles mais la thématique fait bel et bien partie des 14 projets du programme européen de coopération maritime en méditerranée « Med-Maritime Integrated Projects ». Le GPMM entend bien d’ailleurs avoir le lead sur ce sujet qui offre une opportunité « pour un positionnement structuré et cohérent en Méditerranée » (Lire à ce sujet : Ports du range Sud : L’évidence méditerranéenne).

     

    Briques technologiques déjà existantes à Marseille

    Pour le GPMM, il existe déjà quelques illustrations d’un port qui serait « smart ». Le logiciel « Neptune » gère les escales maritimes. Le Cargo Community System CI5, système d'informations appelé à remplacer courant 2018 le très connu dans le milieu portuaire français AP+, développé par la société basée à Marseille MGI, pilote les flux de marchandises et les procédures douanières. Le programme européen de guichet unique portuaire, en cours de déploiement, permettra du reste de consolider au niveau national et européen les données techniques sur le navire mais aussi sur les marchandises.

    Le port de Marseille est aussi le premier en Méditerranée à expérimenter le branchement des navires à quai au réseau électrique haute tension, avec la compagnie La Méridionale (qui représente 20 % des escales du bassin Est) et trois de ces navires. Enjeu : limiter les rejets atmosphériques polluants, gaz à effet de serre, bruit, vibrations. L’arrêt des groupes électrogènes permettrait de s’épargner l’émission de particules (PM10) et de CO2 équivalant à 3 000 aller-retour en voiture entre Marseille et Aix à chaque escale (soit 11 fois par semaine). Plus de 4 M€ ont été investis dans cette action (financement par le GPMM, La Méridionale, l’État, le Feder, l’Ademe et la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur). Un déploiement est envisagé avec Corsica Linéa, héritière de la défunte SNCM, compagnie emblématique de la desserte corse.

    La place portuaire marseillaise planche également sur un système de soutage dans la perspective du développement de la propulsion au gaz des futurs navires. "Notre problématique "énergie" est double, explique Frédéric Rychet : nous devons travailler sur l’approvisionnement des navires à quai mais aussi sur la motorisation des navires.

     Le GPMM étudie par ailleurs, en partenariat avec le pôle de compétitivité Mer Méditerranée la faisabilité technique et opérationnelle d’épurateurs mobiles de fumées (filtres posés à l’intérieur de la cheminée du navire quand il est en escale). De nombreuses études suggèrent qu’une réduction de plus de 90 % des émissions d’oxydes de soufre serait possible grâce à l'utilisation de ce procédé, qui neutralise une grande part des pollutions des gaz d’échappement à l’aide d’un fluide absorbant des oxydes de soufre (cf. Le port de Marseille lève l'ancre sur ses initiatives « vertes »).

     

    Une chaire « Smart port » ?

    « Il faudra s’assurer de deux choses : travailler à la fois sur les projets déjà existants et matures qu’il s’agit d’accompagner jusqu'au financement. Mais il faut aussi veiller àl’alimentation régulière de projets. C’est toute l'ambition du Challenge de l’innovation que nous allons lancer mi 2018. Le but est de fournir des territoires d’expérimentation entre les grands groupes et les start-up sur des sujet pré-identifiés », explique Frédéric Rychet.

    Pour améliorer le transfert vers le terrain, une structure (« Brain port community ») sera chargée de synchroniser les enjeux longs de la recherche et les demandes « pressantes » du milieu professionnel, d’où l’implication d’ Aix-Marseille Université. Cela devrait aussi s'opérer dans le cadre de la future Cité de l'Innovation et des Savoirs, dont le but est de fédérer des structures d'innovation et de se doter de moyens pour accélérer le transfert technologique (cf.Comment l'entreprise est parvenue à infiltrer Aix-Marseille Université). Une chaire « smart port » pourrait être également créée.

    Visiblement, la marque a été trouvée. Et c'est le French Smart port In Med qui s'impose. Une appellation que Christine Cabau-Woerhel, la directrice générale du port de Marseille, a d’ailleurs employée à l’occasion de sa rencontre avec les autorités portuaires de Miami à l’occasion de son déplacement dans le cadre de la délégation provençale collective début novembre.

     

    Politique maritime ?

    Quelle politique portuaire sous le quinquennat d'Emmanuel Macron ? Il devrait en être question à l’occasion des Assises de la mer, le grand rendez-vous annuel du monde maritime, qui se tiennent ces 21 et 22 novembre au Havre. À l’issue du comité interministériel de la mer (Cimer) organisé à Brest en présence des ministres de la Transition écologique et solidaire, de l'Agriculture, des Armées, de l'Enseignement supérieur, des Outre-Mer, des Transports, le Premier ministre Édouard Philippe a simplement évoqué « une politique maritime très ambitieuse », réarmant des idées qui irriguent les réflexions depuis quelques années déjà : développement des énergies marines et transformation du modèle économique des ports…

     

    Adeline Descamps

     

    *Le pôle SCS est à l'initiative de rencontres régulières sur les nouvelles technologies qui bouleversent actuellement l'économie. Le but de ces journées est à la fois de rapprocher les offreurs de technologies avec les acteurs clés, comprendre les enjeux, ramasser les best pratiques, repérer les modèles économiques qui marchent... Le prochain rendez-vous du genre est prévu le 5 décembre sur les véhicules connectés et autonomes.

    **Le GPMM, la CCIMP, Aix-Marseille Université et la Métropole Aix Marseille Provence avaient initié, déjà dans le cadre des travaux de la Mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix Marseille Provence, une démarche de préfiguration d’un smart port métropolitain.

    *** État, Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, Conseil départemental des Bouches-du-Rhône, Métropole Aix-Marseille-Provence, Ville de Marseille, Euroméditerranée, Caisse des Dépôts, Agence Régionale pour l'Innovation et l'Internationalisation des Entreprises, Union Maritime et Fluviale Port de Marseille Fos, CCI Marseille Provence, Aix-Marseille Université

     

    Les projets retenus : une démarche collégiale

     

             •        Channel 5, service numérique destiné aux transporteurs routiers afin de faciliter les accès aux terminaux portuaires, porté par la société MGI avec l'appui du CEA Tech et l'implication d'opérateurs de terminaux, de transporteurs routiers et du GPMM ;

             •        Approvisionnement électrique des bateaux à quai, en conjuguant les initiatives du GPMM et des armateurs pour développer un mix énergétique nouveau ;

             •        Prototype de pilotine électrique porté par le syndicat des pilotes de Port de Marseille-Fos et des partenaires techniques (un sujet porte des enjeux important en amont, notamment en recherche, car il s'agit de la performance limitée des batteries).

             •       Développment d'un smart grid portuaire sur les bassins Ouest et Est (GPMM, Euroméditerranée, Engie, GRT Gaz, RTE...)

             •        Mobile pax pour développer des services et faciliter l'information des passagers (CCIMP, GPMM, Club de la Croisière, Armateurs, Provence Tourisme, Ville de Marseille, Métropole, CD13, etc.) ;

             •        Smart port data pour produire, collecter, mettre à disposition les données qui permettront d'améliorer la gestion et le développement du Port (GPMM, Région, Métropole, CD13, Ville de Marseille, CCIMP, MGI, etc.) ;

             •        Index de performance environnementale pour créer une plate-forme d'échange et piloter les actions menées dans ce domaine (avec Air PACA, GPMM, A Lab in the Air) ;

             •        Cybersécurité portuaire pour développer des solutions protégeant les systèmes critiques des activités portuaires : un sujet sur lequel Naval Group planche notamment avec les ports de Toulon et de Marseille et le pôle Mer Méditerranée. 

     

     

     

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