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1er accélérateur des 146 000 entreprises de la Métropole

Le vade-mecum du drone

 Pas encore une filière mais plus tout à fait objet hors sol de la filière aéronautique, le marché des drones a été appréhendé des sciences aux usages à l’occasion d’un rendez-vous business le 1er décembre. Applicatifs, verrous technologiques, législation, drones du futur...Ce qu'il s'est dit...
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    Dimanche 4 décembre 2016

    Tour de force autour des drones. En une matinée et en présence d'une quinzaine d’intervenants, l’écosystème de « ce qui n’est pas encore une filière mais un segment très compétitif de la filière aéronautique » (selon les termes de Philippe Zichert, élu de la CCI Marseille Provence issu de la nouvelle mandature) a été balayé de la science aux usages. Champs d’applications pour offrir un retour d’expérience sur les exploitations possibles de cet objet volant relativement récent. Persistantes limites technologiques pour désigner les verrous qu'il reste à lever. Un arrêt législatif sur la réglementation française en attendant celle à venir émanant de l’Union européenne. Assez dense mais éclairant.

    Que faudrait-il retenir du rendez-vous Industrie et Innovation organisé par la CCI Marseille Provence en partenariat avec le Conseil départemental et la Métropole sur le technopole Château Gombert à Marseille ce 1er décembre ? Revue en quelques points saillants.

     

    Le drone est d'abord et avant tout un produit high-tech

    Il ressort finalement de l'ensemble des interventions que le drone reste d’abord un produit high-tech avec une prééminence du software, se développant à un rythme plus proche de celui du mobile que de l'aéronautique. Demain, il devra gagner en autonomie et s’enrichir de « modules » dits intelligents, via notamment l’intelligence artificielle de façon à gérer plus efficacement ses missions et gagner en « compétences » : gérer l'imprévu, apprendre le terrain, reconnaître une situation déjà vécue, etc.

    A cet égard, Christian Rey, directeur d’accélérateurs publics (Ville de Marseille) sur des technologies de rupture, ne se prive pas de signaler qu'il planche sur le sujet en étudiant la création d’un incubateur jumelant robotique embarquée, intelligence artificielle et drones.

     

    Le drone gagnerait à s’inspirer des insectes 

    « Une mouche va rentrer dans cette pièce, va naviguer sans cartographie ou GPS et va s'en sortir très bien sans entrer en collision avec quoi que ce soit », plante Stéphane Viollet (photo), directeur de recherche au CNRS et responsable de l'équipe biorobotique à l'Institut des sciences du mouvement à Marseille (CNRS/Aix-Marseille Université).

    Les équipes du chercheur développent une approche scientifique, entre robotique et biologie, qui s’apparente davantage à la bioinspiration (s'inspirer de la nature, sans la copier, pour créer des nouvelles technologies) qu’au biomimétisme (reproduire des structures, comme des matériaux ou des capteurs, que la nature a pu développer). Mais dans les deux cas, il s’agit bien de comprendre la nature pour, pourquoi pas, en tirer des nouvelles technologies. C’est ainsi que l'unité de recherche a pris les insectes comme modèles pour créer des capteurs optiques qui équiperont des robots.

    « La nature est une source d'inspiration sans fin. La plupart du temps, elle nous conduit à des choses auxquelles on n'aurait pas forcément pensé. C'est ce qui va nous permettre de mettre au point des technologies de rupture. Comment imaginer que voir flou peut être fonctionnel pour permettre à un drone de naviguer de manière autonome par exemple, si on n'étudie pas au préalable la vision de la mouche, qui détecte un obstacle, mais pas les textures complexes ? », explicite-t-il.

    Le chercheur a notamment participé au développement du premier œil composé artificiel inspiré de celui de la drosophile (projet européen CurvACE). Installé sur des robots de l’ISMM et de l’EPFL, CurvACE a fait ses preuves expérimentalement. Un aéronef doté de cet œil pourrait par exemple intervenir dans une zone difficile d’accès, détectant les obstacles pour les éviter « naturellement », sans nécessiter de télécommande. Parmi les secteurs applicatifs : l'assistance anticollision frontale, l'inspection d’ouvrages d’art, mais aussi l'assistance aux personnes mal voyantes, afin de leur permettre de détecter plus efficacement des obstacles…

     

    Le drone n’est qu’une brique technologique

    C’est le message adressé par Pascal Zunino président-fondateur de Novadem, entreprise aixoise pionnière sur les micro-drones destinés aux marchés civils et militaires. « Il faut beaucoup de technologies qui s’agrègent pour pouvoir adresser une solution à l’industrie. On est sur plusieurs projets de recherche avec la DGA, Airbus, le CNRS ».

     Après 5 ans de R&D, « 3 M€ investis en fonds propres sur nos produits, 5,1 M€ en projets collaboratifs, 5 ans de commercialisation avec des clients-tests », la société, qui développe, industrialise et commercialise ses propres produits dans une totale indépendance technologique (du bout des hélices jusqu’au calculateur embarqué), engrange enfin les marchés. En novembre, après une première commande enregistrée en 2015 auprès de la Gendarmerie nationale (quatre micro-drones NX110), la PME a emporté avec ce même « client » un nouveau marché de 19 machines de ses tout nouveaux NX70. Plus compacte et plus légère (moins de 1 kg) que son aîné, à l’autonomie de vol prolongée (jusqu'à 45 minutes) et à la résistance au vent améliorée, (jusqu'à 60 km/h), la nouvelle génération de drones a en outre intégré les dernières technologies de capteurs et de transmission des données recueillies par des caméras ultra-HD.

    Pour rappel, la société équipe déjà les sapeurs-pompiers (SDIS 13) et l’armée française (DGA et STAT) mais est aussi parvenue à s’implanter chez les grands donneurs d’ordre français, SNCF, Safran ou Airbus Defence & Space qui les exploitent à des fins de « cartographie de lieux ou de sites, de substitut aux hommes dans certaines opérations, de coordination de moyens ou encore afin d’améliorer l’efficacité de la recherche sans par exemple polluer la scène ».

     

    Mise en garde contre les réglementations bloquantes

    Selon le cadre réglementaire, la filière sera en mesure de développer ces atouts et de les traduire en emplois. Ou ... de stériliser à la fois l'innovation et freiner le développement du marché. C’est en somme ce qu’a exprimé Gérard Bramoullé, vice-président de la Métropole, qui tout en invitant à ne pas « diviniser » cette innovation – « Une technologie reste une technologie. Un usage est une affaire d’homme » -, espère que les futures réglementations ne seront pas trop bloquantes, citant un rapport parlementaire éloquent sur l’obésité normative en France « qui empêche d’avancer ».

     

    Les drones de demain auront de plus en plus d’intelligence embarquée

    « Il faudra que le drone intègre davantage de puissance de calcul embarqué », insiste Jean Delzers, dirigeant de la start-up de Fuveau Smart Aerial Machine, spécialisée dans l’acquisition d’images par des moyens aériens et des traitements d’images en 2D et 3D.

    « On a démarré en planchant sur un besoin détecté pour lequel il y avait un déficit de technologies : surveillance d’ouvrages d’art (ponts, viaduc, barrages etc.) opérée actuellement par les hommes (cordistes, nacelles sous ouvrages, ndlr) ».  

    La société est actuellement partenaire du pôle drones de la SNCF (qui serait en Europe l’un des premiers exploitants de drones civils) sur un programme de recherche MECPN, acronyme de « Mise en conformité des passages à niveau », lancé en avril 2015. Il a pour objectif de doter l’entreprise publique d’un outil d’analyse topographique 3D par photogrammétrie pour les passages à niveaux à profils dits « agressifs pour les véhicules ».

     

    Une législation qui s'enrichit

     

    C’est connu. La France, pays de réglementations et de normes, est rarement en retard sur la législation. En matière de drones, elle est même pionnière visant à encadrer une filière qui, jusqu’alors, restait confinée dans le domaine de l’aéromodélisme, à l’exception des applications militaires. L’actualité regorge d’exemples sur les risques engendrés par l'intrusion du drone, dont la principale difficulté est l’absence de personnes à bord. Aussi, la perspective de leur utilisation à des fins terroristes hante tous les services de sécurité. « Contrairement à ce que l’on croit, la France dispose d’un cadre législatif et elle fut la première en Europe à légiférer », contrecarre Françoise Derout (photo), présidente de Air Space Drone, start-up hébergée sur le campus Charpak de l'école des Mines de Saint-Etienne, qui a développé un boîtier permettant de suivre un drone durant son vol et d'éviter aussi la collision.

    La spécialiste préconise d’intégrer le plus en amont possible le droit selon le principe de « Privacy by design », qui oblige à intégrer le respect de la vie privée directement dans la conception, le fonctionnement et les usages : « pensez à crypter les programmes et les images de façon à qu’ils ne soient pas accessibles par un tiers ». Une référence aux problématiques suscitées par l'utilisation des drones civils sur le plan de la protection de la vie privée et des traitements de données à caractère personnel (CNIL). La France est particulièrement contraignante sur ce point.

    Les deux arrêtés (orginels) de 2012 réglementaient principalement la conception et l’utilisation de drones civils (RPAS) sur son territoire. L’un sur la conception et l’exploitation des « aéronefs qui circulent sans personne à bord », le second, sur l’utilisation de l’espace aérien par ces mêmes aéronefs. La nouvelle réglementation, en vigueur depuis le 1er janvier 2016, reprend ces deux arrêtés mais les éclaire sur la base de trois ans d’expérimentations. 

     

    L’Europe, en attente de sa réglementation

    Jérôme Monnot, CEO de la société de Martigues Drone Horizon Technologie (imagerie aérienne en environnement complexe) s’exprimait avec sa casquette de porte-parole du syndicat nationale des pilotes professionnels de drones civils.

    « Le projet de directive européenne piloté par l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) s’inscrit dans une démarche ambitieuse visant à insérer le drone dans le trafic aérien en général avec, pour objectif, une publication d’ici fin du premier semestre 2017 ».

    Le Parlement européen a adopté une résolution le 29 octobre 2015 destinée à poser les bases d'une réforme de la réglementation applicable à l'utilisation des drones à laquelle la loi française répond déjà en partie.

    Dans les grandes lignes de la future réglementation européenne contenue aujourd’hui dans 70 pages, « le plus important est dans les annexes », plaisante Jérôme Monnot. Le projet distingue quatre catégories d’appareils et adopte plusieurs approches selon qu’elle s’adresse aux constructeurs, aux prestataires, aux exploitants… ». À prévoir notamment pour les fabricants, un certain nombre d’obligations et de démarches administratives (attestation, inscription, certification, autorisation) et pour les grands opérateurs (vols de longue distance, livraison…) des contraintes pour s’insérer dans les espaces aériens en fonction notamment de la catégorie d'appareils et du scénario de vol envisagé. Pour l’ingénieur électronicien, « tout reposera essentiellement sur deux concepts électroniques : le geofencing (système de gardiennage virtuel, ndlr) et l’identification électronique à distance et configurable ».  

     

    Retours d’exploitation sur les usages : entre agriculture de précision et sécurité civile

    Ingénieur en informatique et automatisme et titulaire d'un DEA en biologie, le fondateur et gérant de Drone Ere Patrice Morgallet (photo) a notamment spécialisé sa société Drone Ère créé en 2014 à Eyragues dans l'agriculture de précision : « Le drone est, dans ce domaine, essentiellement une aide à la décision dont les gains sont variables : tout dépend de l’objectif des agriculteurs et de ses  choix : pallier un stress hydrique par une meilleure irrigation va-t-elle rapporter plus que gagner 10€/ha sur l’épandage d’azote de colza ? », interroge-t-il faussement.

    « L’écosystème des drones a besoin d’innovation, de réglementation, d’acceptance cognitive sociale », pose le commandant Gigan, en charge du CED, le Centre d'excellence drone logé à Salon-de-Provence, pour lequel « le concept d’emploi est primordial ». Exemple à l'appui : « Nous avons été sollicités par un industriel qui avait soi-disant un besoin. Il voulait explorer des cavités. Nous avons, volontairement, établi un cahier de spécifications avec de la réalité virtuelle, de l’intelligence artificielle, des capteurs, beaucoup de technologies en somme pour démontrer par l’absurde que l’industriel avait juste besoin d’une caméra sur rail ! ». Et de recommander : « étudier le besoin bien en amont avant de solliciter la technologie drones ».

    « Contrairement à ce qu’a préconisé le commandant Gigan, chez nous, cela ne s’est pas exactement passé ainsi », relève le Commandant Rodriguez, responsable du service innovation prospective du SDIS 13, qui exploite à ce jour trois drones dont un de Novadem. « Peu de services départementaux Incendie exploitent les drones et quand ils le font, ce n’est pas toujours de façon très structurée. Nous avons travaillé à l’envers, partant de l’objet pour lui trouver des usages », explique le sapeur-pompier qui tire de ces deux ans et demi d’exploitation plusieurs enseignements. Avant intervention, il est surtout un outil d’aide à la décision : « il permet de faire des plans en 3D d’éléments sensibles sur lesquels on pourrait être amenés à intervenir et donc offre une connaissance du secteur d’intervention ». Pendant l'action, « il va chercher l’info et on peut imaginer un transfert en temps réel pour renseigner les autorités ». Après, « il est une solution économiquement intéressante à la place de l’hélicoptère. Il faut savoir qu’une fois un feu de forêt éteint, cela n’est pas fini. En principe, on met des équipes sur place pour parfaire l’intervention et identifier les points chauds qui peuvent être à l’origine des reprises ».

    Prochaine étape pour le représentant de la sécurité civile : pouvoir assurer des recherches de personnes la nuit. Mais avant cela, prévient-il, ils devront s'affiner en technologies pour pouvoir valoriser tous les usages : en termes de « charge utile, d'autonomie, de résistance au vent, de streaming », ils sont nettement perfectibles, insiste-t-il.

     

    A.D

     

    Le premier « droneparc indoor » en région ?

    Pour illustrer une autre composante du marché des drones : le divertissement, la startup aixoise Humans and Drones a présenté son son projet de « droneparc indoor », l'Astrogare, destiné au « dressage » des drones sur le marché du divertissement et de l’évènementiel (l'espace sera privatisable par exemple pour des séminaires entreprises ou des besoins techniques, prototypages et tests par exemple). Le nouvel espace, conçu sur le modèle d'un parc de loisirs thématique, proposera notamment des parcours immersifs avec lunettes et caméra embarquée à bord du drone ainsi qu’un environnement dédié au sport de la course. Il diposera en outre d'un fablab mis à disposition des visiteurs et d'un espace de restauration et de détente.

    « Passerelle entre les écosystèmes 'aéronautique' et 'sport' du territoire, ce projet de premier Astrogare peut trouver toute sa place dans les champs de création de valeur territoriale Marseille 2017 – Capital européenne du sport », commente Patrick Zimbardo, expert innovation à la CCI Marseille Provence.

     

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