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1er accélérateur des 146 000 entreprises de la Métropole

Réparation navale : La convergence des « grandes formes »

Alignement des agendas. Les chantiers navals de La Ciotat viennent d'inaugurer officiellement la réception de la « grande forme ». Le port de Marseille annonce la livraison imminente de la sienne. Les deux n'adressent pas le même marché mais capitalisent sur le gigantisme des bateaux.
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    Lundi 3 avril 2017

     

    Les deux infos se télescopent, et si en apparence elles se ressemblent, elles ne s’assemblent pas tout à fait dans une même … « forme ». Elles visent toutes deux le marché de réparation navale et la mise en service de nouveaux équipements (les grandes formes) après travaux. Mais la dite « Grande forme » des chantiers navals de La Ciotat concerne la maintenance des superyachts et mégayachts. L’autre, la Forme 10, à quelques encablures des terminaux de croisière à Marseille, doit répondre aux besoins de réparation de très grands navires (spécialisés) tels que les bateaux de croisières, vraquiers, gaziers... (; cf. encadré).

    Ce 3 avril, les vannes du bassin de réparation navale (un outil vieux de 50 ans qui avait cessé son activité en 1988 avec la fermeture du chantier Normed), ont été ouvertes en contrebas des quais François Mitterrand des chantiers navals de la Ciotat. Un geste symbolique car l’outil, après un an de travaux et moyennant un investissement de 15,8 M€*, est en réalité opérationnel depuis novembre dernier.

    Raboté de 135 m (initialement sa longueur atteignait 335 m) de façon à l’adapter à la maintenance /réparation/modernisation de la plaisance, le nouvel équipement accueillait déjà en janvier un de ces superyachts (les + de 80 m) que visent les chantiers ciotadens : Ulysses, l'un des plus grands yachts explorer du monde (107 mètres). Un marché dont la société publique locale (SPL) SEMIDEP-Ciotat (société gérant La Ciotat Shipyards), propriétaire du site, attend un chiffre d'affaires entre 30 et 40 M€

     

    Les 105 irréductibles

    La véritable information de cette inauguration en présence d’élus de la circonscription et de professionnels du secteur (étaient notamment présents Jean-Gabriel Tridon, directeur général de Blohm+Voss La Ciotat, Peter Lürssen, le « patron » du groupe éponyme, et Pepe Garcia, le dirigeant de MB92, tous deux à la tête des plus grandes entreprises mondiales du secteur), n’est donc plus celle-ci. Même si l'événement consacre tout à la fois une reconquête industrielle (ancienne friche devenue un spot méditerranéen de maintenance et de réparation des yachts cf. La revanche en deux décennies des chantiers navals de la Ciotat), une bataille sociale (foyer de résistance ouvrière pendant de longues années), et une aventure humaine (pour préserver un outil de travail et écarter l’idée d’une marina), qui n’ont pas de prix pour les 105 ouvriers irréductibles de la défunte Normed emmenés par le résilient Pierre Tidda (qui refuse toujours de parler aux journalistes), dont on ne pouvait louper les bleus de travail parmi les « tenues correctes exigées ».

    Aujourd’hui, sur 34 ha et 1 200 mètres de quais, le chantier ciotaden accueille 35 entreprises et 700 emplois. Plus de 100 navires de plus de 50 m y ont été accueillis en 2016, générant un chiffre d’affaires de 120 M€ au dernier recensement de la SPL. Un résultat obtenu moyennant quelque 83 M€ d’investissements perlés deux décennies durant, dont 32 % financés par le public, le reste étant apportés par les partenaires privés et les fonds propres de la SEMIDEP.

     

    À ces 105 hommes en bleu , les élus ont rendu hommage, à commencer par le maire de La Ciotat et 1er vice-président du département des Bouches-du-Rhône Patrick Boré - « ils surent sensibiliser et unir des collectivités aux options politiques différentes autour d’un projet auquel ils croyaient fermement » -, et plus surprenant, de la part de Peter Lürssen dans un hommage appuyé.

    L’allemand de Brême n’est autre que le directeur général de l'un des leaders mondiaux (aux 140 ans d’histoire) de la construction de superyachts et de navires militaires (auteur à ce jour du plus grand yacht du monde d’ailleurs). Il est aussi l’attributaire de la cale sèche remise en forme.

    Que le geste soit habile, il n’en est pas moins « apaisant » dans cet écosystème qui, ces derniers mois, a fait l’objet d’un véritable ball-trap. Pour rappel, fin juin 2016, les collectivités territoriales*, actionnaires de la SPL créaient la surprise en attribuant l’exploitation de l’infrastructure rénovée à l'allemand Blohm+Voss (2 800 salariés, 6 chantiers de construction ou de refit principalement situés en Allemagne du Nord) au détriment notamment de l’historique opérateur local CompositeWorks, qui d’ordinaire très discret, avait peu de temps avant de connaître la décision, contrarié sa nature en conviant opportunémement presse et quelques officiels pour rappeler à quel point l’entreprise avait contribué à la renaissance de l’outil.

     

     

    L'opérateur choisi pour éxécuter le contrat d’amodiation, pourtant volontairement limitée à 35 mois (un temps exceptionnellement court pour « expérimenter un nouveau modèle économique » soutenait le mandataire), avait fait l’effet d’un coup de tonnerre sur les terre-pleins du chantier.

    Puis, trois mois plus tard, nouveau rebondissement. Blohm+Voss (alors propriété du fonds d’investissements Star Capital Partners) faisait l'objet d'une opération d'acquisition par le chantier allemand Lürssen, héritant ainsi de La Ciotat, dont le sort devenait très incertain.

    Finalement, à l’issue d’une négociation entre mandataire et délégataire, il était convenu la création d’une société Blohm+Voss La Ciotat, joint-venture entre Lürssen et le barcelonais Marina Barcelona 92 (MB92), acteur méditerranéen de poids dans l’industrie du refit et partenaire historique du groupe Lürssen. Le tout en « bonne intelligence », selon les termes de la SEMIDEP, avec les opérateurs locaux, dont CompositeWorks, qui pourrait exploiter l’outil (Le Marin a très récemment informé que MB92 serait en négociations avec CompositeWorks pour pousser le partenariat : jusqu'au joint-venture ?).

     

    L’étape d’après ou le coup d’avance ?

     

    L’idée est aujourd’hui de franchir une nouvelle étape : après avoir réussi le premier pari de se positionner sur les yachts de 40 à 80 m, les actionnaires de la société publique locale gagent sur les plus de 80 m. Dans ce marché gagné par le gigantisme, les projets à plus de 80 mètres n’étonnent plus : 44 unités en commande en 2015, 47 en 2016, avec des prévisions à la hausse pour 2017. 755 unités de plus de 24 m sont en cours de construction de par le monde, le chiffre le plus élevé depuis près de 6 ans.

    « Nous en avons les moyens. Les loyers versés par l’exploitant vont non seulement rentabiliser les investissements mais permettront de dégager les marges nécessaires pour financer de nouveaux développements », a soutenu l’édile LR de La Ciotat, qui au passage a rendu hommage à Jean-Claude Gayssot, le ministre socialiste des Transports du gouvernement Jospin qui a débloqué les crédits pour permettre les investissements qui s'avèrent payants aujourd'hui. « Un plan Scale up 2018 sera examiné par les membres du conseil d’administration le 7 avril. Il est basé notamment sur la conviction que nous pouvons pousser nos performances en allant plus loin dans la mise en œuvre de nos moyens puisqu’en plus de l’adaptation de la grande forme, seule la moitié des 35 hectares du site est aujourd’hui exploitée ».

    Patrick Boré devrait proposer aux actionnaires de valider le principe d’un nouvel investissement : un ascenseur à bateau de 4 000 m (le premier ascenseur à bateaux d’une capacité de 2 000 tonnes a été inauguré en 2007).

    « Toutes les études économiques préliminaires ont été menées et nous savons qu’un tel projet est finançable et rentable. Reste à déterminer le bon montage entre investissements privés et publics. Si le conseil d’administration valide, nous souhaitons lancer dès cette année un appel à projets ».

    Martine Vassal, présidente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône, avait en effet mentionné, à l’occasion salon de la plaisance à flot des Nauticales, un projet d'achat d'un ascenseur à bateaux de 4 000 tonnes pour La Ciotat.

     

    La concurrence n'attendra pas

    Pour sa part, Bernard Deflesselles, vice-président de la Région en charge de l’innovation et de l’internationalisation des entreprises, distribuant ses salutations au passage à Monaco Marine et CompositeWorks (son fondateur Ben Mennem était dans l’assistance), a rappelé pour sa part que la concurrence n’attendait pas.

    Au-delà des dimensions de tel ou tel outil, qui n’est pas le bon prisme pour apprécier le marché et le contexte, la force de la Ciotat est surtout à jauger à l’aune d’autres indicateurs : l’aubaine géographique (sa localisation en Méditerranée où croisent la majorité des grandes unités d’avril à septembre : 6 294 yachts cabotent dans les eaux du monde entier, dont 5 063 yachts de plus de 30 m, selon Superyachts Intelligence), le savoir-faire technique avec la présence significative d’opérateurs, et la disponibilité « foncière » en sus des infrastructures. L’ensemble en fait un des sites capables de se positionner sur le créneau des superyachts et de rivaliser avec Barcelone, La Spezia, ou Naples.

    Le « hub » pour superyachts et megayachts qu’est Marina Port Vel à Barcelone (où est installé MB92) réfléchirait aussi à l’opportunité d’un équipement similaire à celui qu’envisagent aujourd’hui les chantiers navals de la Ciotat pour « upgrader », croit savoir le député de la circonscription Deflesselles.

     

    Adeline Descamps

     

    * Il a été financé par la Semidep (33 %), la Région PACA (25 %), la Métropole Aix-Marseille Provence (20 %), le Département des Bouches du Rhône (17 %) et la Ville de La Ciotat (5 %), tous actionnaires de la société publique locale.

     

     

    La flotte des superyachts en 2016 ?

    Total des yachts en activité : 4 634

    Evolution du carnet de commandes : 764 (en 2008), 395 (en 2013) et 427 (en 2016)

    Augmentation des commandes des yachts de + de 80 m : 44 unités (en 2015) et 47 unités (en 2016), avec des prévisions à la hausse pour 2017.

    La France ne fait pas partie du Top 10 des chantiers mais 8 yachts et superyachts de plus de 80 pieds y sont actuellement en cours de construction. Ce chiffre ne comprend pas les 4 yachts de plus de 80 pieds en cours de construction chez Monte-Carlo Yachts, filiale du groupe Bénéteau, localisée en Italie.

    Source : SuperYacht Company

     

    Forme 10 : Livraison imminente à Marseille

     

    Courant avril, annonce le Grand Port Maritime de Marseille confirmant le calendrier présenté par Christine Cabau-Woehrel, la présidente du directoire de l'établissement public, lors de la conférence de presse en janvier, la forme 10, bassin de réparation navale dont les dimensions hors normes (465 m de long et 85 m de large) doivent permettre à Marseille de challenger Palerme et Cadix, subira ses ultimes tests en situation réelle.

    À l’issue, le Chantier Naval de Marseille (CNM), opérateur désigné par le port en 2012, en prendra possession et « sera en capacité technique de démarrer son activité de réparation dès que son agenda commercial l’exigera, ce qui s’annonce pour avant l’été », précise l’autorité portuaire marseillaise dans un communiqué. Soit avec un an de retard sur le calendrier initialement projeté en raison de plusieurs avaries techniques subies par cet ouvrage maritime que l'on dit complexe.

    Pour rappel, l’outil mis en service pour la première fois en 1975 et en friche depuis les années 2000, a bénéficié de 32 M€ pour sa « réactualisation » (cofinancée par l’État, le conseil régional Provence- Alpes-Côte d’Azur, le Conseil départemental des Bouches-du-Rhône et la Caisse des dépôts).

    L’infrastructure complète le pôle de réparation navale industrielle constitué d’un ensemble de trois bassins avec les formes 8 et 9 (respectivement 320 m et 250 m de long), elles-mêmes opérées depuis 2010 par le CNM. L’outil pourra ainsi répondre aux besoins de réparation de navires dans les secteurs de la croisière mais aussi des gaziers, vraquiers ou porte-conteneurs.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

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