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Ports du range Sud : L’évidence méditerranéenne

Coup de menton dans l’eau ou esquisse d’une coopération portuaire, vingt-cinq ports méditerranéens ont échangé deux jours durant à Marseille. il fut question de problématiques communes mais aussi du caractère hautement stratégique de la Méditerranée sur le parcours des routes maritimes mondiales.
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    Lundi 5 décembre 2016

    Il n’est pas tout à fait fortuit que le port de Marseille ait initié, sous la férule d’Intermed Gateways (association créée les ports de Barcelone, Marseille et Gênes), un « entre-soi » méditerranéen visant à « se mettre en ordre de marche pour construire les bases d’une coopération » selon les termes posés en ouverture par Christine Cabau Woehrel. Depuis son arrivée à la tête du Grand port maritime de Marseille (GPMM), la présidente du directoire reste rivée sur un objectif : installer une nouvelle ligne de « flottaison » portuaire, qui permettrait en option basse, de rééquilibrer les échanges sur le marché euroméditerranéen, et en version ambitieuse, d’affirmer les ports dudit « range Sud » (Marseille-Fos, Algesiras, Valence, Barcelone, Gênes, Giaio Tauro, La Spezia etc.) en alternative crédible à ceux du range Nord (Rotterdam, Anvers et Hambourg), lesquels règnent en maîtres sur les trafics Est-Ouest, ces routes maritimes qui concentrent aujourd’hui la très grande majorité des flux maritimes réguliers (ceux reliant l’Asie à l’Europe, l’Asie à l’Amérique du Nord et, dans une moindre mesure, l’Amérique du Nord à l’Europe)

     

    Et plus si affinités ?

    C’était donc une « première », mais 25 places portuaires méditerranéennes, soit 80 professionnels (autorités portuaires et acteurs du domaine maritime et logistique euro-méditerranéens), ont accepté l’invitation en vue d’échanger, via des sessions, pratiques et expériences deux jours durant sur les sujets qui animent leur quotidien (sécurité, gestion de l’évolution de la demande de transport et de la surcapacité, environnement, report modal…).

    Et plus si affinités ? Les parties prenantes espéraient sans doute parvenir à une déclaration commune qui aurait listé, outre des intentions, un plan d’actions aptes à relever les défis spécifiques à cet espace : « mettre en place de nouveaux couloirs logistiques stables et compétitifs, susciter de nouvelles routes maritimes au cœur du bassin méditerranéen, installer des dessertes efficaces vers l’hinterland, construire une communauté économique élargie capable de répondre aux défis de la logistique mondiale » etc.

    Jean-Luc Chauvin, le nouveau président de la CCI Marseille Provence, partenaire de l’opération, n’exhortait-il pas, lors de l’ouverture, à construire une « Méditerranée de projets, tournée vers l’économie », la seule voie qui permette d’aller vite, « car le temps de l’économique n’est pas celui du politique ». Rappelant qu'au Nord, les grands ports maritimes sont organisés en réseau, il s'est dit prêt à engager le monde économique dans cette dynamique voire « à enrôler l’ensemble des CCI de Méditerranée et d’Afrique au sein des réseaux ASCAME et CPCCAF. L’an prochain, à cette même occasion, peut-être pourrions-nous envisager que chaque port soit accompagné de sa CCI et d’une entreprise cliente ».

    À cet égard, l’invitation adressée à un représentant de la Baltic Ports Organisation, qui serait le modèle « le plus intégré de coopération interportuaire » bénéficiant de surcroît d’un retour d’expérience de 25 ans, était sans doute destinée à montrer qu’une coopération n’est efficace qu’à partir du moment où elle est initié par les acteurs (sous-entendu, et non pas à la demande de tiers gouvernementaux).

    C’était sans doute ambitieux pour un premier exercice, qui s’est finalement soldé par un engagement commun à organiser « le plus tôt possible » un MedPorts 2 au cercle élargi et à créer une plate-forme Internet, première pierre à la création d’un réseau plus structuré.

     

    Contexte mondial aléatoire

    L’opération était en tout cas tout sauf évidente au regard des jeux d’influence portuaire au sein de ce bassin géostratégique où les acteurs restent avant tout des concurrents, confrontés à des réalités économiques fort différentes et à des disparités notamment conditionnées par leur positionnement géographique (selon que l’on soit placé près ou loin des détroits et des stratégiques Canal de Suez, du Bosphore ou de Gibraltar), facteur capital pour aimanter la marchandise à transporter.

    Le contexte mondial n’aide pas non plus, étant pour le moins aléatoire, a signifié Isabelle Ryckbost. Et la secrétaire générale de l'association des ports européens (Espo) de lister un ensemble de facteurs qui risquent d’impacter les ports : le Brexit, la crise de Schengen (les migrants), la contestation d’accords commerciaux et le retour du protectionnisme (effet « Trump ») ou encore l’agenda de développement durable* (sachant que les infrastructures portuaires méditerranéennes sont très urbanisées) et enfin les aides publiques sous pression des budgets asthéniques des Etats. « Mais, nuance la porte-parole des places portuaires, on voit le bout du tunnel dans les politiques européennes de transport qui prennent en compte les corridors Sud**».

     

    Lieu d'éclatement idéal

    Plus certaine est l’évidence méditerranéenne, aidée par sa géographie, qui en matière de transport maritime, reste la clef d’un destin portuaire. Et en l’occurrence, la Méditerranée n’est plus une « route de passage annexe » ou une « zone de problématisation élevée », assure Paul Tourret, directeur de l’Institut supérieur d'économie maritime (Isemar), « elle devient un cœur de marché pour les lignes conteneurisées ». « Le monde a changé et nous sommes maintenant au centre des échanges mondiaux », dit de façon plus explicite le directeur général adjoint du port de Barcelone, Santiago Garcia-Milá.

    Lieu d’éclatement idéal entre la « fameuse » Triade Europe, Afrique et Moyen-Orient, point de passage où transitent selon les années entre un tiers et un quart du trafic mondial maritime, la Méditerranée pourrait (re)trouver une place de « centre du monde » maritime à condition de relever le défi de la conteneurisation, condition essentielle pour s’arrimer aux flux mondiaux, défend l'économiste Paul Tourret. Les ports européens de la Méditerranée captent actuellement 25 % des flux conteneurisés Asie-Europe (trade le plus convoité à la fois pour ses volumes et pour son équilibre entre les importations et les exportations). Le trafic des porte-conteneurs y enregistrerait une croissance annuelle de 10 %.

    Il en veut pour preuves les investissements (extension des terminaux portuaires, création de ports ex nihilo) et les intérêts (arrivée des grands opérateurs mondiaux de terminaux conteneurisés, à commencer par les Asiatiques) dont ont fait l’objet ces dernières années les places dites stratégiques (là où la tentation de développer des hubs est forte) sur l’échiquier des routes commerciales. « Les investissements de Cosco Shipping (devenu l'actionnaire majoritaire du port du Pirée en août, ndlr) sont une nouvelle illustration que la Méditerranée devient une zone d’attractivité majeure ».

     

    50 % de la population de l’hinterland européen dans le sillage des ports méditerranéens

    Les armateurs et opérateurs maritimes plaçant logiquement leurs hubs sur les routes les mieux « alimentées », les ports d’Algeciras (Espagne), Tanger Med (Maroc), Marsaxlokk (Malte), Port Saïd et Damiette (Egypte), Gioia Tauro (Italie), dopés par les logiques de transbordement, ont pu s’imposer comme des points d'articulation entre le trafic intercontinental et intra-méditerranéen. D’autres, tels Barcelone, Valence ou Gênes ont émergé comme d’importants ports de chargement avec hinterland capables de recevoir de grands navires « feeders » pour assurer la logistique des marchandises vers leur arrière-pays sur le modèle des ports de l’Europe du Nord. « En Espagne, Valence est la principale porte d’entrée vers Madrid et l’hinterland nationale alors que Barcelone étend son activité ferroviaire jusqu’à Lyon grâce à la liaison BarceLyon Express. Sans le fer, on ne peut pas conquérir son hinterland » insiste Paul Tourret, qui rappelle que 50 % de la population de l’hinterland européen se trouve dans la zone d’intervention des ports méditerranéens.

    C’est aussi ce déficit de connexions terrestres entre le Sud du continent et l'Europe centrale, se soldant pour moindre qualité des services, qui serait, selon Intermed Gateways, responsable des disparités entre les ports orientaux et occidentaux de la Méditerranée, à l'avantage de ces derniers, mais aussi un obstacle au développement de la conteneurisation.

    Dans les échanges et les débats, il fut certes question du poids de la Méditerranée dans le transport maritime et de l’arrimage aux réseaux de transport européens, mais aussi du gigantisme des navires qui poussent à « multiplier les escales » et posent de problèmes de surcapacité, « ce qui n’est pas sans impacts pour les autorités portuaires », ainsi que « du peu de fiabilité des grands opérateurs de ligne régulière » ...

     

    Forces en présence

    Selon la société néerlandaise de consulting maritime Dynamar, qui fait autorité dans le secteur, l'ensemble des ports méditerranéens traiteront en 2017 près de 17 millions d'EVP (équivalent vingt pieds, unité de mesure de conteneur), contre 15,6 millions en 2015. Elle estime les capacités de la région portuaire méditerranéenne à 70 MEVP et prévoit qu’en 2030, 114 millions de boîtes pourraient être traitées dans les ports méditerranéens.

    Pour rappel sur les forces en présence sur le segment du trafic de conteneurs, Rotterdam (12,3 millions d'EVP), Anvers (9,65 MEVP) Hambourg (8,8 MEVP) et Bremerhaven (5,5 MEVP) captent à eux seuls près de 89 % du trafic maritime européen.

    En Méditerranée, les ports espagnols Algésiras (4,5 MEVP) et Valence (4,4 MEVP), et italiens de Gioia Tauro (3 MEVP) et Gênes (2,2 MEVP) forment le quatuor de tête. Marseille-Fos est encore loin derrière avec 1,22 millions de boîtes traitées mais avec une croissance 4 %, il se distingue de celle des ports européens et français, deux fois moindre. Anvers est en effet le seul port d’Europe du Nord à avoir présenté une hausse de trafic dans le domaine du conteneur : Rotterdam régresse de 0,5 %, Zeebrugge de 23,3 %, Hambourg de 9,2 %, Brême de 3,7 %.

    Toutefois, si la bataille se joue aussi à terre, il est à noter qu’à Hambourg, 2,3 millions d'EVP sont arrivés ou ont été évacués par rail en 2015. Le port allemand revendique ainsi 50 % de conteneurs transportés par le fer, contre 19 % pour Rotterdam et près de 8 % pour Anvers.

    A.D
     

    * Les ports sont actuellement concernés par les normes SECA relatives à la teneur maximale en soufre des combustibles marins, qui sont utilisés dans des zones dénommées "zones de contrôle des émissions de SO2" (ZCES ou SECA selon l'acronyme anglais), fixée à 0,10 % depuis le 1er janvier 2015, conformément à l'annexe VI de la convention Marpol.

    **Pour supprimer des goulets d’étranglement, moderniser les infrastructures, contribuer à l’interconnexion entre les différents modes de transport aux frontières ou le long des principaux corridors, et à la réalisation des objectifs en matière de changement climatique, la Commission européenne a développé le concept d’un réseau transeuropéen de transport (RTE-T) multimodal, qui s’appuie sur un réseau « central » constitué par neuf grands corridors de transport. La Méditerranée est concernée par quatre d’entre eux.

     

     

    Mondialisation maritime

    - Les exportations mondiales de marchandises se sont élevés à 18 494 milliards de dollars en 2014 selon l’OMC, dont un tiers vers l’Asie

    - L’Union européenne est restée le principal exportateur au cours des 20 dernières années (suivie de l’Asie), ses exportations s’élevant à  6 162 Md$, soit 33 % du commerce mondial en 2014. Le commerce à l’intérieur de la région y a représenté en moyenne plus de 70 % de ses exportations totales de marchandises.

    - En Afrique, la part du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA) dans les exportations mondiales de marchandises est resté au niveau de 1995, soit 0,5 % (96 Md$), tandis que la part de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) est passée de 0,9 % à 1,1 % en 2014 (205 Md$).

    - Toutes marchandises confondues, les flux intra-méditerranéens, représentent à peine un quart du trafic.

    - L’Union européenne (UE) représente, selon les pays, entre 20 et 70 % du commerce des Pays du Sud et de l'Est méditerranéen (PSEM) alors que les PSEM ne représentent que 8 % du commerce extérieur de l’UE. 

    - Le trafic en provenance d'Asie transite pour 70 % vers l'Europe du Nord et pour le reste s'arrête en Méditerranée, principalement dans les ports de Méditerranée occidentale (Gênes, Marseille, Barcelone, Tanger).

     

     

     

    Autoroute maritime

    À l’occasion de la rencontre, Francesc Carbonell, chef de projet à l’Union pour la Méditerranée (UpM), a rappelé que parmi les 45 projets labellisés figuraient les autoroutes de la mer.

    Pour rappel, l’UE a qualifié d’Autoroutes de la mer, les liaisons maritimes dont la vocation était de transférer une part du trafic poids lourds de la route vers la mer. Il s’agit d’embarquer des camions complets ou leurs remorques à bord de navires roulier (RoRo) pour effectuer un trajet qu’ils faisaient auparavant par la route. Cette politique fait partie des projets RTE-T (Réseaux Transeuropéens de Transport) qui permet d’interconnecter les différents réseaux nationaux et de créer des liaisons transeuropéennes pour les différents modes de transports (route, rail, air, mer...).

    Bruxelles subventionne à ce titre des liaisons maritimes qui doivent trouver une pérennité économique au travers des programmes Marco Polo, MoS (Motorway of the Sea) et tout récemment Medamos II. Deux liaisons entre la France et l’Espagne viennent d’être inaugurées. Reste à engendrer l'enthousiasme chez les armateurs ou logisticiens.

     

     

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